Mohamed Abdel Azim 

 

 

 

 

 

 

                                                     

D’Osirak à Damas, un message à l’Iran (2)

Par Mohamed Abdel Azim

      

Juin  2008

 

  La dissimulation du raid

L’opération d’attaque contre le réacteur nucléaire syrien rappelle celle contre le réacteur nucléaire irakien en 1981. Mais pour l’opération de 2007, Israël aurait manipulé les radars syriens pour dissimuler son raid aérien, selon des experts cités par le site Internet du magazine spécialisé Aviation Week.

 

Les avions de chasse israéliens ont alors échappé à la vigilance des radars syriens grâce à un système induisant en erreur les réseaux de détection syriens. Selon des responsables militaires et des industriels de défense américains, les F-15 et F-16 de l'armée israélienne pourraient avoir été équipés du système "Suter" d'attaque aérienne de réseaux, développé par le groupe britannique de défense BAE Systems, qui équipe les drones américains (avions sans pilote). Ce système a été testé en Irak et en Afghanistan au cours de l'année, selon Aviation Week. Cette technologie très avancée permet de localiser les capteurs ennemis avec précision et de leur envoyer de fausses informations et de fausses cibles, camouflant ainsi les appareils en approche.

 

« La censure militaire a autorisé pour la première fois à publier que des appareils de combat israéliens ont attaqué un objectif militaire situé en profondeur du territoire syrien », rapporte le 2 octobre 2007, la radio militaire israélienne. Cette dernière  confirme pour la première fois, après la levée de la censure militaire sur cette opération, qu'Israël a bel et bien mené une attaque aérienne en Syrie,

 

La levée de la censure sur cette attaque est intervenue après un entretien accordé la veille par le président syrien Bachar al-Assad à une chaîne de télévision britannique dans laquelle il a pour la première fois reconnu qu'une attaque israélienne avait visé un objectif militaire en territoire syrien. Le président Bachar al-Assad déclare que la Syrie se réservait « le droit de répliquer de différentes façons" au récent raid israélien contre son territoire."Répliquer ne veut pas dire missile contre missile, bombe contre bombe », déclare le dirigeant syrien dans une interview à la BBC le 01 octobre 2001.

 

"Mais si nous ripostions militairement, nous serions en train de réagir conformément à l'agenda israélien, ce que nous rejetons. Cela ne veut pas dire que nous voulons dilapider les chances d'une paix dans un avenir prochain", ajoute le président syrien.

 

Une erreur d’interprétation ?

 

Un compte-rendu de débat à l'ONU prêtant à l'ambassadeur de Syrie l'admission implicite que le raid aérien israélien en Syrie visait un site nucléaire, était inexact car entaché d'une erreur d'interprétation, affirme le porte-parole de l'ONU Farhan Haq, le 17 octobre 2007.  « Il y a eu une erreur d'interprétation  en anglais des propos du délégué syrien, alors qu'il s'adressait en arabe à la commission du désarmement de l'Assemblée générale de l'ONU », déclare M. Farhan Haq. « L'interprète a dit que le délégué syrien avait fait référence à une attaque contre un site nucléaire, mais en réalité ce dernier a dit: …Comme ce qui s'est passé le 6 septembre contre mon pays… », indique M. Haq après audition de l'enregistrement original du débat par des responsables de l'ONU. « Il n'y a eu aucune utilisation du mot nucléaire », précise le porte-parole.

 

Les médias israéliens, se référant à un compte-rendu de la séance publié sur
un site Internet de l'ONU, rapporte que le diplomate syrien avait parlé d'un raid aérien sur une installation nucléaire. « En outre, Israël est le quatrième exportateur mondial d'armes de destruction massive et un violateur de l'espace aérien d'autres pays et il a agi contre des installations nucléaires, y compris dans son attaque du 6 juillet contre la Syrie », disait ce compte-rendu. Le raid aérien israélien dans le nord de la Syrie a eu lieu en fait le 6 septembre et non le 6 juillet. Les informations de la presse israélienne ont entraîné un démenti officiel de Damas. Les autorités syriennes soulignent qu'aucune installation nucléaire n'existe dans leur pays.

 

La Syrie nie les propos prêtés à son ambassadeur aux Nations unies, « Le ministère des Affaires étrangères nie des informations diffusées par des médias selon lesquelles l'ambassadeur de Syrie à New York (Bachar al-Jaafari) a déclaré que le raid mené le 6 septembre avait visé un site nucléaire », souligne un communiqué du ministère syrien des Affaires étrangères, daté du 17 octobre 2007.  « Un tel site (nucléaire) n'existe pas en Syrie »(…) « La Syrie a déjà éclairci cette question », ajoute le communiqué.

 

La nature du raid israélien en Syrie est officiellement inconnue. L'Etat hébreu a tout d'abord imposé un mutisme total, avant de signifier le 2 octobre avoir attaqué un "objectif militaire", sans apporter plus de détails. La veille, le président Bachar al-Assad avait assuré que l'action menée par l'armée israélienne avait frappé un bâtiment militaire non utilisé.  C’est le quotidien américain New York Times, qui  le premier, a évoqué le fait qu'Israël avait visé un site soupçonné d'abriter un réacteur nucléaire en cours de construction, copié sur une centrale nord-coréenne.


La thèse de la destruction d'installations nucléaires avait été très vite avancée en dans la presse anglo-saxonne, sans que soient éclaircis le rôle de la Corée du Nord et le type d'activités nucléaires visées. Melissa Flemming, la porte-parole de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) affirme de son côté : « ne pas disposer d'informations sur un réacteur nucléaire non déclaré en Syrie.(…) Nous n’avons 'a pas d'informations sur quelque centre nucléaire non déclaré que ce soit en Syrie », indique l’AIEA.

 

Les Syriens ont toujours nié que la cible bombardée par Israël était un réacteur nucléaire en construction. Ils préfèrent affirmer qu'Israël a pris toute cette peine pour bombarder un entrepôt militaire vide.

 

Washington se trouve face à un dilemme important : celui de choisir une nouvelle cible d’attaque.  Entre la Syrie et l’Iran quel est le pays qui représente le plus d’intérêt à être le nouveau méchant dans la région ? Telle est la question que l’on peut se poser. Beaucoup font le pari de l’Iran, mais vu du Moyen-Orient, il ne faut parier ni sur l’un ni sur l’autre car Bush ne dispose d’aucun élément en sa faveur pour mener quelconque attaque.

Mohamed Abdel Azim*
Lyon - France

 


Mohamed Abdel Azim est docteur en Science politique, journaliste à EuroNews, membre du Comité Directeur Newropeans en charge des affaires méditerranéennes et arabes. Il est l’auteur du livre : Israël et la bombe atomique, la face cachée de la politique américaine, Paris, publié aux éditions l’Harmattan, 2006.

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