Newropeans Magazine

De l’Afghanistan à l’Irak fin de l'unilatéralisme américain PDF Print E-mail
Written by Mohamed Abdel Azim   
Wednesday, 14 February 2007

 

ImageLe monde est en phase de mutation dans son système international. Ce dernier vit des frictions et s’oriente vers une zone de crise globale. Conscients de cette situation d’impasse, les puissants de notre monde se sont réunis pour trouver une issue à cette crise globale qui se profile. La 43ème conférence pour la sécurité, qui a lieu à Munich les 10 et 11 février, montre que la phase de friction s’aggrave entre la Russie et la Chine d’une part et les États-Unis d’autre part alors que l’Europe quant à elle, cherche toujours sa place.

ImageSurnommée le "Davos de la sécurité", la tenue de cette conférence survient juste après une réunion informelle des ministres de la Défense de l'OTAN à Séville. En présence de 270 participants de quarante pays, elle fait surgir la notion de la crise globale. Lors de son édition 2007, ce forum, très atlantiste, met sur son agenda le thème de la "crise globale, responsabilité globale". Utiliser le terme crise globale est en soi un précédent dans le domaine des relations internationales.

Nous avons alors assisté à des débats animés autour des sujets tels que : la politique de puissance de la Russie, le partage des rôles de l'OTAN et de l'Union européenne dans la résolution des conflits, le Moyen-Orient, le Liban, le nucléaire iranien, l'Irak, l'engagement risqué de l'Alliance en Afghanistan, et le statut du Kosovo. Autrement dit,  la conflictualité se généralise et le système ne peut plus remplir sa fonction de régulation. Le constat montre que l’unilatéralisme américain ne peut plus s’imposer face à la Russie qui commence à montrer clairement qu’elle refuse son écartement.
 
Visiblement exaspéré par la politique des États-Unis, Poutine s’est présenté comme le champion du multilatéralisme face à l'unilatéralisme de l'hyper puissance américaine. L'Allemagne qui préside, 16 ans après sa réunification, l'Union européenne et le G8, a acquis plus d'assurance sur la scène internationale, notamment dans son rôle d'intermédiaire au Moyen-Orient. La chancelière conservatrice Angela Merkel bâtit sa logique sur l'existence de "menaces et de chances communes" et donc sur la nécessité d'une "responsabilité globale". L’Allemagne, présidente en exercice de l'Union européenne, se prononce contre une solution des crises fondée sur les seules interventions militaires et déclare son opposition aux actions unilatérales et à celles qui se font en violation du droit international.


Le président russe Vladimir Poutine livre sa vision des remèdes aux tensions mondiales et aborde la question de la défense anti-missile, de l'Iran ou de l'élargissement de l'OTAN. Le constat de Poutine montre que le système international actuel n’offre pas les conditions nécessaires pour faire face aux crises  majeures comme celle de la prolifération nucléaire ou des conflits régionaux. La Russie se trouve face à la logique des néo-conservateurs, visant à revitaliser les valeurs patriotiques américaine à l'intérieur tout en suivant une politique dynamique et agressive à l'extérieur des Etats-Unis.

Moscou voit que Washington applique une politique d’extension basée sur la force ; il  lui demande donc de revoir sa copie et songe à l’inflexion. Le 10 février, lors d’une interview à la chaîne de télévision satellitaire arabe Al-Jazira, M. Poutine va même jusqu’à dire que l'intervention américaine avait fait plus de mal à l'Irak que Saddam Hussein.

Les propos du chef de l'État russe ont une teneur forte. Lors de la conférence de Muniche Poutine souligne qu’"un monde unipolaire ne signifie en pratique qu'une chose, un centre de pouvoir, un centre de force, un centre de décision agissant comme un maître unique, un souverain unique, qui s'effondrera de l'intérieur. Cela n'a rien de commun avec la démocratie", dit le président russe faisant allusion aux États-Unis. Poutine saisit l'occasion et critique l'extension du bouclier antimissile américain en Pologne et en République tchèque, un projet qui selon lui n'a rien à voir avec les menaces actuelles dans le monde.

Le constat montre que sur fond de lutte contre la menace terroriste, Washington mène la guerre en Afghanistan. La perception de la menace théorique de Saddam Hussein avec ses laboratoires nucléaires fictifs et ses armes de destruction massive, motive le déclenchement de la guerre en Irak en 2003. Depuis, la prolifération passe au travers du filet américain. Avec le test nucléaire de la Corée du Nord en 2006, et la poursuite du programme nucléaire iranien, les États-Unis assistent impuissants à l’entrée de la question de la prolifération dans une phase de non contrôle. Les raisons de la montée en puissance de Moscou et de ses inquiétudes résident dans la volonté américaine de trouver une nouvelle fonction à l’OTAN. Cette structure, né de la guerre froide, n’a plus d’ennemi désigné.

Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, lance un appel aux alliés de l'OTAN à mobiliser des troupes et moyens suffisants pour que l'offensive de printemps en Afghanistan soit la leur et non celle des talibans. "L'offensive en Afghanistan au printemps sera notre offensive, une offensive à même d'infliger une défaite cuisante aux ennemis du gouvernement élu soutenu par une écrasante majorité du peuple afghan" déclare M. Gates. En terme militaire cela signifie que la guerre contre les Talibans est toujours en cours et que l’OTAN, depuis 2001 jusqu’à présent, est en difficulté dans ce pays.

Mohamed Abdel Azim
Lyon (France)



*Mohamed Abdel Azim est docteur en Science politique, journaliste à EuroNews il est l’auteur du livre : Israël et la bombe atomique, la face cachée de la politique américaine, Paris, l’Harmattan, 2006.

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